..............................................................................

“LETTRE OUVERTE AU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE JOVENEL MOISE”.

Par Sem Lapaix

Lascahobas, le 5 novembre 2018
Au Président de la République,
S.E.M Jovenel Moïse

..............................................................................

C e n’est pas avec tout l’honneur d’un citoyen que je vous adresse cette correspondance car l’indignation que vous inspirez à toute Lascahobas réduit cette démarche à la simple limite du devoir. En effet, Monsieur le Président, en qualité de Premier citoyen de la nation, en raison de cette position d’ainesse, vous devriez être tenu au bien-être de tous les citoyens sans exclusive. Dans votre discours de campagne, vous l’aviez reconnu, vous l’aviez dit. Suivant les exigences du jeu démocratique qui sont manifestes aux élections, vous aviez dû être candidat sous la bannière d’un groupe politique à moins que vous ayez choisi d’être candidat indépendant. Mais, pour vous faciliter l’accès, vous avez choisi de faire campagne sous la bannière du PHTK, et vous aviez promis d’être le Président de tous les haïtiens, pas un chef de groupe, d’un clan, qui ne serait redevable qu’envers ses partisans.


Monsieur le Président, vous allez avoir deux bonnes années depuis que vous aviez prêté serment en tant que le 58e Président de la République. Je salue les efforts que vous exercez pour répondre dans une certaine mesure aux belles promesses que vous avez faites au peuple haïtien. Je ne veux pas douter de votre volonté; je veux croire plutôt que c’est à la méthode qu’incombe ce spectre d’échec qui plane au dessus de votre quinquennat. Peut-être aussi que vous êtes prisonnier de votre entourage, ce groupuscule qui n’a vraisemblablement aucun intérêt et aucun lien véritable avec le peuple haïtien.


Monsieur le président de la République, je suis un citoyen de Lascahobas, Chef-lieu d’un arrondissement de quatre communes dont Lascahobas, Belladère, Savanette. Acceptez, Monsieur le Président, que je vous rappelle que Lascahobas, fondée en 1760, est vielle déjà de 258 années. Elevée au rang de commune depuis 1814, soit dix ans après l’indépendance, elle est en droit d’être orgueilleuse. Jusque vers les années 1950, elle fut un district militaire où résidaient un capitaine, un Lieutenant et de hauts dignitaires de l’Armée d’Haïti. Lascahobas fut le bastion de grandes activités politiques, sociales, culturelles et économiques de tout le Plateau Central. Lascahobas a été la route principale de tout le Plateau Central vers Port-au-Prince grâce à un pont jeté sur le fleuve Artibonite en 1925 par le Président Louis Borno. En 1952, le Président Paul Eugène Magloire a fait le suivi du projet d’un barrage conçu par son prédécesseur Dumarsait Estimé dans le but d’éviter l’inondation de la vallée de l’Artibonite par le fleuve, et le Président François Duvalier a inauguré la centrale Hydro électrique de Peligre, une localité de la section communale de Petit Fond, commune de Lascahobas, d’où l’Etat haïtien par le biais de l’Electricité d’Haïti produit de l’énergie électrique qu’il distribue à la capitale haïtienne et à une bonne partie du reste de la République.


Monsieur le Président, permettez-moi de vous apprendre qu’avec l’Etat dont vous êtes aujourd’hui le chef et avec le pouvoir que vous détenez, vous héritez d’une dette envers Lascahobas. En effet, Monsieur le Président, lorsque l’Etat haïtien enlevait de la propriété des paysans de Lascahobas les 6400 hectares de leurs meilleures terres pour contenir les eaux du lac artificiel de Peligre pour produire de l’électricité au bénéfice de toute la République, on leur avait promis en retour logement, école, centre professionnel, hôpital, eau potable, route etc. On avait promis aux agriculteurs, aux éleveurs, et aux pêcheurs, encadrement nécessaire à la valorisation et à l’augmentation de leurs activités, en plus, naturellement, l’électricité produite à partir de ces terres. Monsieur le Président de la République, ça fait déjà 66 années, et l’Etat haïtien n’a toujours pas tenu sa promesse envers Lascahobas. Au contraire, on assiste à un complot systématique visant à rayer Lascahobas avec toute sa belle histoire et son passé glorieux de la carte de la République. Lascahobas, qui avait dans un passé assez récent sept sections communales, serait réduite aujourd’hui à pratiquement deux. Il semblerait, Monsieur le Président de la République, que votre administration a la mission d’accomplir cette ignominie, cette extermination ; ce que je condamnerais et que je dénonce car depuis votre accession à la magistrature suprême de l’Etat, vous ne ratez aucune occasion d’humilier Lascahobas aves ses représentants ainsi que ces citoyens. Vous traversez maintes fois Lascahobas, le Chef-lieu de l’arrondissement, pour vous rendre dans toutes ses communes dépendantes : Belladere, Savanette et Baptiste, pour ouvrir et inaugurer d’importants travaux d’infrastructures, et même dans le cadre de votre programme de caravane, vous n’y avez ni déposé ni déplacé une pierre. Pour aucune raison, Monsieur le Président, cette attitude envers une communauté ne fait en aucune manière honneur à la fonction que vous remplissez encore moins à votre qualité d’homme d’Etat. Peut-être qu’on vous a appris que Lascahobas, cette terre qui a vu naître Benoit Batraville, encore aujourd’hui rebelle à toutes tentatives d’installation de projet anti peuple, ne vous a pas voté en grande pompe. Mais vous devez être convaincu qu’il y avait inévitablement des citoyens qui vous ont bel et bien choisi dans la commune. Tout au moins, à Lascahobas, votre parti a jusqu'à aujourd’hui une coordination, celle bien sûr qui a contribué à votre accession au pouvoir.


Monsieur le président de la République, rassurez-vous que l’Etat n’aurait point à faire de cadeau à Lascahobas. Avec la centrale hydro électrique de Peligre, Lascahobas permet à l’Etat de produire 54 Mégawatts de courant électrique qu’il vend au reste de la République. Le marché de Casse dans la section communale de La Hoye d’importance binationale, celui de la ville de Lascahobas qui attire des commerçants venus de partout de la région, celui de Dos-bois-rouge de la section de Juampas, celui de Cabestor de la section de Petit Fond ; sont assez profitables aux caisses de l’Etat. Nonobstant les contradictions, les paysans de la zone du lac font de Lascahobas un grenier important pour la capitale… En plus, comme tous les autres citoyens haïtiens, ceux de Lascahobas auront à restituer à l’Etat vénézuélien la dette des fonds Petro caribe. Ironique, Monsieur le Président, Lascahobas n’a pas un seul marché public construit, Lascahobas n’a même pas un centre de santé fonctionnel, aucune route menant dans les sections communales, pas un centre de formation, pas une bibliothèque, il n’y a même pas d’électricité qu’irrégulièrement dans quelques quartiers de la ville. L’eau potable y est aussi manquée. On ne cesse de traiter Lascahobas en parent on ne peut plus pauvre.


 

 

Monsieur le Président de la République, je suppose qu’à la fin de votre mandat vous allez devoir retourner à Lascahobas avec votre parti, comme au reste du pays, pour solliciter de la population son vote. Pour cette raison au moins, même si vous voulez continuer à nier votre redevance envers cette population, faites quelque chose.


Espérant que vous accorderez une attention digne à cet appel que je fais au nom de tous, citoyens et citoyennes de la commune de Lascahobas, je vous prie, Monsieur le Président de la République, de recevoir mes salutations respectueuses et patriotiques.

Haiti Radio Stations