Richard Morse
Une lettre ouverte à Ban Ki-Moon
Pourquoi Haïti ne peut pas oublier son passé
Par Richard Morse
Cher M. Ban Ki-Moon
Merci pour l'attention que vous avez montré pour Haïti En réponse à votre papier dans le New York Times, je souhaiterais élargir votre champ de perspective un petit peu. Je ne prétends pas représenter un autre que moi-même. Je vis en Haïti depuis 1985. J'ai grandi à la Nouvelle Angleterre avec ma mère, une Haïtienne et mon père, un Étatsunien au cours des années1960 et 1970. Bien que mes parents aient été tous les deux des professeurs, je ne suis rien de plus qu'un musicien et patron d'hôtel.
A mon arrivée en Haïti, le cochon Créole, un cochon indigène haïtien qui représentait la colonne vertébrale de la vie du paysan, avait été éradiqué à cause de la menace d'une soi-disant fièvre. A la même époque, Leslie Delatour et" les Chicago boys" (un club économique) persuadaient tout le monde que les Haïtiens devaient importer le riz de qualité inférieure et le sucre au lieu de le produire eux-mêmes.
Ces trois actes (cochons, sucre et riz) ont détruit la vie rurale en Haïti et ont créé une surpopulation dans les villes. Ces trois actes ont enrichi le "Gang des Onze", l'élite économique haïtienne, qui en plus de profiter de tout ce qui se passe en Haïti, nous ont également donné les régimes répressifs de Henry Namphy, Raoul Cedras et Gérard Latortue.
Santé publique en Haïti : non existante. Éducation publique : non existante, infrastructure en Haïti : non existante, aide étrangère parvenant à la population haïtienne : non existante Combien de million de dollars ont été versés pour Gonaïves depuis l'ouragan Jeanne en 2004 ? La dernière fois où j'ai circulé en voiture à travers Gonaïves, il ne me semblait pas que plus de quelques centaines de dollars aient été dépensés.
La loi (HOPE) sur le textile que vous soutenez enrichira encore plus la riche élite mais offrira à une infime partie des masses haïtiennes, la possibilité de se maintenir la tête hors de l'eau, étant donné que la plupart des20salaires payés dans ces usines, couvre seulement le coût du transport aller et retour et un repas du midi. Si, cependant vous envisagez de procurer un système de santé, un repas et l'éducation pour au moins deux enfants en plus d'un salaire raisonnable, alors, je pense que vous êtes sur la bonne voie. Autrement, je crois que vous vous trouvez du mauvais côté de la barrière.
Quand le téléphone cellulaire est arrivé en Haïti, les compagnies étaient dirigées par les élites haïtiennes et leurs représentants. Les téléphones et les cartes étaient trop chers pour l'ensemble de la population. Le " club de la communication" en Haïti était un club exclusif et qui voulait le demeurer. Les "familles" le voulaient ainsi. Venant d'Irlande arrive Digicel à la rescousse : téléphones bon marché, tarifs bas, service supérieur. Quiconque souhaite communiquer avec Haïti, peut le faire maintenant. Démocratie dans la communication. Digicel a eu tant de succès en Haïti, qu'ils y ont installé leur quartier général pour la Caraïbe. Quand le gouvernement a vu le succès de Digicel, il a voulu augmenter les taxes des communications. Digicel a menacé de partir.
Si vous plaidez pour la démocratie dans l'économie haïtienne, je vous soutiendrai, mais si vous plaidez pour que le "Gang des Onze" devienne plus riche et le reste des gens plus pauvres, je ne saurais même pas de quelle manière vous apporter mon soutien. Le peuple haïtien a voté pour des dirigeants et le Gang des Onze les a achetés.
Lors du dernier passage de M. Clinton en Haïti, j'avais eu la possibilité de le rencontrer chez moi, à l'Hôtel Oloffson. Il m'avait demandé depuis combien de temps je vivais en Haïti et je lui avais répondu : "Ca fait 22 gouvernements".
Lors de votre récent voyage, M. Clinton nous a demandé d'oublier notre passé et de regarder vers le futur. Les Haïtiens ne peuvent pas oublier leur passé. Aristide est un phénomène créé en réaction à la manière dont le Gang des Onze dirige ce pays. Les Haïtiens ont l'obligation d'essayer de pardonner mais nous ne pouvons pas nous permettre le luxe d'oublier les tribulations de notre passé. Nous avons également une culture profondément enracinée dans le passé, ce qui fait que ce type de commentaire apparaît légèrement dépourvu de sensibilité. Je comprends et veut croire que M. Clinton et vous-même avez les meilleures intentions pour Haïti, mais parfois des décisions sont prises sans tenir compte de leur impact potentiel.
Nous avons désespérément besoin de besoin de développer la production nationale dans la campagne. Peut-être que le Président Préval n'était pas en position de vous le dire, mais c'est la réalité. Si votre soutien va uniquement à HOPE, tous les gens de la campagne vont venir à la capitale à la recherche d'un job. S'il vous plaît, n'oubliez pas l'irrigation, les paysans, les écoles, les infrastructures dans les campagnes et n'oubliez pas, dans votre inévitable deal avec le Gang des Onze, qu'ils sont à la recherche la plupart du temps de moyens pour sucer Haïti jusqu'aux os et passer leurs longs weekends à Miami. La majorité des Haïtiens n'est pas autorisée à se rendre à Miami.
Mes préoccupations sont la Culture et le Tourisme; Je parlerai de ces sujets une autre fois. En espérant que d'ici là, il ne sera pas trop tard pour corriger le chemin dans lequel nous sommes poussés.
Sincèrement vôtre,
Richard Morse Port-au-Prince Haïti
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